Orval ou le mystère de la tour des braconniers, de Patrick Fischer Naudin, roman paru en 2008 se passe en Belgique, juste de l’autre côté de la frontière, mais Orval, c’est si familier qu’un récit ancré à l’abbaye, c’est finalement une histoire bien de chez nous (en tout cas pour la partie est du département des Ardennes). C’est bien la preuve que les lettres ardennaises ne se limitent pas aux tracés des frontières administratives ou internationales, du moment que ça se passe près de chez vous, ça vous concerne.
Le personnage principal, Léon Magresse, la quarantaine passée, a une existence solitaire assez grise qu’un licenciement a assombrie plus encore. C’est presque par hasard qu’il rencontre l’abbaye d’Orval où il décide d’y effectuer une retraite pour faire le point sur son existence et réfléchir à l’avenir. Alors l’aventure peut commencer.
Malgré un tel titre, le roman démarre un peu lentement, avec une ambiance sociale plus à la Maigret que d’un roman d’aventures et de mystères tel que le suggère le titre. Mais cela est rattrapé à partir du chapitre 4.
« Au commencement d’Orval, la parole est à la légende avec la comtesse Mathilde… »
Avec le personnage, on apprend l’histoire de l’abbaye. On se souvient de la légende de la Fontaine Mathilde et de l’origine du symbole de l’abbaye. On déguste la bière locale.
« Comment voulez-vous prétendre pénétrer les secrets des moines trappistes d’Orval si vous ne goûtez pas leur bière ! »
Puis tout s’emballe et le contenu du roman ne fait plus mentir le titre. On est entraîné dans les coins les plus inconnus de l’abbaye. Malheureusement, de même que, dans de nombreux romans d’aventures et de voyages, il nous manque une carte pour visualiser la progression des protagonistes, ce qui manque ici, c’est le plan de l’abbaye. Malgré cela, le personnage Léon Magresse, tenace quand il s’agit de percer un mystère, nous amène jusqu’au dévoilement du grand secret de l’abbaye.
Jeunes auteurs ardennais, faites maintenant attention, cela peut vous être utile. L’auteur sait utiliser de bons éléments qui font les récits d’aventures et de mystères ; des ingrédients utiles pour créer des œuvres de fiction captivantes. Il place son histoire dans un lieu riche en histoires, en vieilles pierres, et en mystères, étant donné que la communauté des moines reste une communauté fermée.
Il mêle le récit contemporain à l’histoire ou la légende. L’idée de placer l’histoire au sein d’une abbaye offre non seulement un bon huis clos, mais fournit aussi une part quasi naturelle de mystères, et quand l’abbaye dispose de ruines, c’est parfait. L’intrigue, finalement, tourne autour d’un livre trouvé dans la bibliothèque de l’abbaye que réclament des personnages mystérieux. Le livre dans le livre, s’il est interdit ou très recherché pour d’obscures raisons, est un moteur puissant en fiction.
« Ne cherchez pas à savoir sinon vous en mourriez. Et rendez le livre ! »
Le livre, la bibliothèque, les légendes, les ruines d’une abbaye, voilà de bons éléments pour poser une histoire. À vous, auteurs ardennais, de les utiliser savamment pour ne pas proposer à vos lecteurs des poncifs, mais justement des histoires bien ficelées (et bien écrites, il va sans dire).
Et en fin de compte, vous pouvez offrir à vos lecteurs quelque chose de semblable au Mystère de la tour des braconniers, roman de littérature populaire (et cela n’a rien de péjoratif, au contraire) ancrée dans les Ardennes, qui gagnerait en accessibilité et donc en lecteurs s’il était proposé en format poche à un prix poche.
Vous pourrez certainement trouver le livre de Patrick Fischer Naudin
dans les librairies et bouquineries du departement,
mais (peut-être plus facilement) sur internet…
Pour les Ardennais qui voudraient se mettre à écrire des romans ardennais populaires : faites attention à ne pas tomber dans le piège du regionalisme à tout prix, et lisez donc cette autre chronique de la Cacasse littéraire :
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